Tradition mélodique dans les pontificaux manuscrits notés du diocèse de Sens (XIe-XVIe siècle).

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L’évêque, dignitaire sédentaire nommé par le pape, incarne l’unité souveraine de l’église au niveau local : « Dès les premiers siècles chrétiens, la fonction épiscopale figure au premier plan au sein des institutions de l’église ». Il use de divers ouvrages nécessaires au bon exercice de son ministère, à la fois pastoral, spirituel et liturgique. Un recueil essentiel, au sein de cette offre pléthorique, répond à son usage propre : il s’agit du pontifical, renfermant rituels et bénédictions dont l’évêque se doit d’être l’officiant exclusif. Il serait manifeste que ce recueil, d’une importance toute particulière puisque relevant d’une activité extraordinaire, parfois même spectaculaire, ait été l’objet d’une attention rigoureuse de la curie dans sa conception et sa diffusion. Pourtant, son histoire, maintenant bien connue, a de quoi surprendre : loin d’être précisément réglementé, le pontifical, depuis son apparition au milieu du Xe siècle, ne connaîtra de stabilité même précaire qu’à la fin du XVe siècle. Durant les quelques 500 ans qui séparent ces deux dates, il prendra de multiples aspects, successifs ou concomitants, subissant diverses influences extra-curiales tantôt germaniques, tantôt languedociennes... Que l’on s’attache à une vision d’ensemble (organisation du volume, élisions ou ajouts d’ordines), ou que l’on entre dans le déroulement des cérémonies, les témoins manuscrits divergent fortement.
Si l’histoire des pontificaux au Moyen Âge, de ces origines (Ordines Romani, Sacramentaire gélasien) à sa « fixation », et dans ses différents états successifs, est désormais bien connue, les études musicologiques portant sur le répertoire contenu dans les pontificaux replacé dans son contexte codicologique sont peu nombreuses. Nous retiendrons évidemment l’excellent travail de Kozachek en 1995 portant sur le Repertory of chant for dedicating churches in the Middle Ages: music, liturgy and ritual, qu’il observe dans les pontificaux mais également dans d’autres types de manuscrits (Ordines Romani, missels...) notés ou non, son propos étant de rendre compte de l’évolution d’un ordo (la dédicace), dans sa dimension tout autant rituelle que musicale. Je souhaiterais pour ma part m’attacher plus entièrement à la question mélodique, replacée dans le contexte du livre liturgique qu’est le pontifical.
Dans ce cadre, la province ecclésiastique de Sens est à plus d’un titre le théâtre d’événements remarquables durant le bas Moyen-Âge et le XVe siècle. De part sa position géographique centrale (au cœur des Gaules, englobant la capitale des rois de France), son ancienneté (il s’agit de l’une des premières provinces crées dans cette partie de la chrétienté) et la pérennité de ses frontières (plus de 11 siècles de stabilité), l’archiépiscopat sénonais a su asseoir son autorité, intervenant au plus prêt du pouvoir, tant spirituel que temporel.

Le travail que je me propose d'effectuer s’articule autour de trois séries principales de questions :

1 • Est-il possible de définir les usages variants régionaux ou locaux dans le répertoire musical des pontificaux (pièces ou versets d’usage local ou régional, variantes et discrépances mélodiques, transpositions récurrentes...) ? = Étude synchronique ou étude des états.

2 • La réorganisation périodique que connaîtra le pontifical au cours des siècles qui nous intéressent, fait particulièrement notable, à cette échelle, dans l’histoire des manuscrits liturgiques, s’accompagne-elle de modifications, de glissements ou de variations de son répertoire musical ? Cette évolution tend-elle vers l’uniformisation ? L’importante réforme d’Innocent III au début du XIIIe siècle impacte-t-elle notre sujet ? = Étude diachronique ou étude de l’évolution.

3 • Existe-t-il un répertoire d’usage exclusif ? Si oui, est-il possible de l’isoler, le classifier, l’analyser (variantes textuelles et/ou musicales) ?


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